Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 1.djvu/280

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Adieu, Ivan! Ne garde pas mauvais souvenir de moi, lui cria son père pour la dernière fois.

Tous sortirent pour les derniers adieux, Smerdiakov, Marfa et Grigory. Ivan leur donna dix roubles à chacun. Smerdiakov accourut pour ranger le tapis.

— Vois-tu... je pars pour Tchermachnia... dit tout à coup Ivan, avec un sourire « inégal > .

— C’est qu’on dit vrai : il y a plaisir à parler avec un homme intelligent, répondit Smerdiakov en le regardant bien en face.

La voiture partit. Ivan regardait avec avidité les champs, les collines, les arbres, les bandes d’oies sauvages dans le ciel clair. Il éprouva un singulier bien-être. La pensée d’Alioscha, puis celle de Katherina Ivanovna lui revin- rent : il sourit doucement, souffla sur ces fantômes chers et ils s’évanouirent, t Plus tard », pensa-t-il.

Les chevaux allaient vite. On brûla un relai.

  • Il y a plaisir à parler avec un homme intelligent? Que

signifie... » Sa respiration devint pénible.

€ Pourquoi lui ai-je dit que j’allais à Tchermachnia ? »

Au relai suivant, il descendit. Il était encore à douze verstes de Tchermachnia.

— N’allons pas à Tchermachnia, frères, dit-il aux yamt- chiks; pourrais-je encore être à sept heures à la gare?

— Tout juste. Faut-il atteler?

— Attèle! Quelqu’un de vous irâ-t-il à la ville, demain?

— Oui, Mitri.

— Ne peux-tu pas, Mitri, me rendre le service d’aller chez mon père, Fédor Pavlovitch Karamazov, pour lui dire que je ne suis pas allé à Tchermachnia?