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la substance ou plutôt la fable extérieure de mon premier roman[1]. Mais avant de le commencer, il me faut dire quelques mots des deux autres fils de Fédor Pavlovitch.

III

Fédor Pavlovitch, s’étant débarrassé de Mitia, se remaria bientôt. Sa seconde femme, Sofia Ivanovna, vivait dans un autre gouvernement où Fédor Pavlovitch était venu pour affaires. Orpheline, fille d’un pauvre diacre, elle avait été recueillie par la veuve du général Vorokha. Comme elle avait été maltraitée par la générale, Fédor Pavlovitch en profita pour se poser en bienfaiteur, et continua devant elle les orgies auxquelles sa maison était accoutumée. Sofia Ivanovna souffrait d’une maladie nerveuse qui parfois lui faisait perdre la raison. Elle eut deux enfants, Ivan et Alexey, le premier au bout d’un an de mariage, le second trois ans plus tard. Après sa mort, il en fut de ses deux fils comme de Mitia ; ils furent abandonnés aux soins du même Grigory, dont ils partagèrent l’izba.

C’est là que la générale les trouva et les recueillit. Elle vint trois mois après la mort de Sofia Ivanovna chez Fédor Pavlovitch, et ne resta qu’une demi-heure, mais fit beaucoup de choses en peu de temps.

C’était le soir. Fédor Pavlovitch, qui ne l’avait pas revue

  1. Les Frères Karamazov comportaient, dans la pensée de Dostoïevsky, une suite de romans. Il n’a eu le temps de finir que le premier.