Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 2.djvu/167

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La voix de Katia était si impérieuse qu’Ivan, après un instant d’hésitation, se décida à monter avec Alioscha.

— Permettez-moi de garder mon paletot, dit Ivan en entrant dans le salon, je ne resterai qu’une minute.

— Asseyez-vous, Alexey Fédorovitch, dit Katherina Ivanovna.

Elle parut à Alioscha plus belle que jamais.

— Que vous a-t-il dit de me transmettre ?

— Ceci seulement, dit Alioscha en la regardant en face : il vous prie de vous épargner… la peine de dire ce qui s’est passé entre vous… au jour de votre première rencontre.

— Mon salut jusqu’à terre… l’argent… dit-elle avec amertume. Est-ce pour lui ou pour moi qu’il craint ? Parlez donc, Alexey Fédorovitch.

— Pour vous et pour lui.

— C’est cela, dit-elle méchamment.

Elle rougit.

— Vous ne me connaissez pas encore, Alexey Fédorovitch. D’ailleurs je ne me connais pas non plus. Peut-être me maudirez-vous demain, après ma déposition.

— Vous parlerez avec loyauté, dit Alioscha, c’est tout ce qu’il faut.

— La loyauté n’est pas toujours féminine, dit-elle en grinçant des dents. Il y a une heure, je pensais encore qu’il me serait odieux de m’occuper de ce misérable… cette vermine… Cependant, il est encore un homme pour moi. Est-ce bien un assassin ? Est-ce bien lui qui a tué ? demanda-t-elle tout à coup à Ivan Fédorovitch… Je suis allée chez Smerdiakov… C’est toi qui m’as convaincue que