Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 2.djvu/306

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— Sortons, lui dit-elle à voix basse.

Alioscha jeta un long regard sur son frère.

— Il guérira, dit-il d’une voix douce et ferme à Katia, quand il fut revenu dans le salon, il guérira !

— Absolument ! il guérira absolument, c’est ce que j’ai toujours pensé. D’ailleurs vous aviez raison, je ne le quitterai pas, je ne dois pas le quitter ! s’écria-t-elle avec exaltation. Il n’a que nous deux au monde, Alioscha. Mais vous, outre que vous avez mission de sauver votre autre frère, l’avenir vous séparera nécessairement de l’un et de l’autre ; moi, au contraire, Ivan Fédorovitch peut être mon propre avenir.

— Adieu, Katia.

— Adieu, frère, et adieu aussi à celui qui s’en va. Portez-lui la dernière prière de celle qui lui a fait tant de mal. Je ne veux pas le revoir maintenant, mais dites-lui que nous nous reerrons… plus tard… tous heureux… dites-lui que je ne cesserai jamais de l’aimer et priez-le de me bénir ; de me pardonner… de me pardonner ! répéta-t-elle avec violence. Dites-lui encore que je veux qu’il se sauve ! La liberté, l’amour avec… avec celle qu’il aime, le bonheur…

Elle n’acheva pas, un sanglot lui coupa la voix. Elle prit la main d’Alioscha, la porta rapidement à ses lèvres et s’enfuit. Alioscha resta un instant interdit, puis il secoua doucement la tête et sortit.