Page:Dostoïevski - Les Possédés, Plon, 1886, tome 1.djvu/290

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olodovitch se trouvait encore à trente pas de la maison quand il aperçut, debout sur le perron, un homme de haute taille, sans doute le maître du logis, qui était sorti pour jeter un coup d’œil sur le chemin.

— C’est vous ? Vous ! cria ce personnage avec un mélange d’impatience et de timidité.

Nicolas Vsévolodovitch ne répondit que quand il fut tout près du perron.

— C’est moi, fit-il tandis qu’il fermait son parapluie.

— Enfin ! reprit en s’empressant autour du visiteur le maître de la maison qui n’était autre que le capitaine Lébiadkine ; donnez- moi votre parapluie ; il est tout mouillé, je vais l’étendre ici sur le parquet dans un coin ; entrez, je vous prie, entrez.

La porte du vestibule, grande ouverte, donnait accès dans une chambre éclairée par deux bougies.

— J’avais votre parole, sans cela, j’aurais désespéré de votre visite.

Nicolas Vsévolodovitch regarda sa montre.

— Minuit trois quarts, dit-il en pénétrant dans la chambre.

— Et puis la pluie, la distance qui est si longue… Je n’ai pas de montre, et de la fenêtre on n’aperçoit que des jardins, de sorte que… on est en retard sur les événements… mais je ne murmure pas, je ne voudrais pas me permettre ; seulement, depuis huit jours, je suis dévoré d’impatience, il me tarde d’arriver enfin… à une solution.

— Comment ?

— D’entendre l’arrêt qui décidera de mon sort, Nicolas Vsévolodovitch. Je vous en prie…

Il s’inclina en indiquant un siège à Stavroguine.

Ce dernier parcourut des yeux la chambre ; petite et basse, elle ne contenait en fait de meubles que le strict nécessaire : des chaises et un divan en bois, tout nouvellement fabriqués, sans garnitures et sans coussins ; deux petites tables de tilleul, l’une près du divan, l’autre dans un coin ; celle-ci, couverte d’une nappe, était chargée de choses sur le