Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/201

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Un jeudi soir, ne pouvant plus supporter mon isolement, je me souvins de Simonov. En montant à son quatrième étage, je songeai que je lui étais pénible et que j’avais tort de l’aller voir. Mais cette réflexion était précisément de celles qui m’encourageaient dans mes mauvaises pensées ; j’entrai chez lui. Il y avait près d’un an que nous ne nous étions vus.

Je trouvai chez lui deux autres anciens camarades d’école. Ils discutaient visiblement quelque importante affaire. Mon arrivée n’intéressa personne, chose étrange, car je ne les avais pas vus depuis des années. Je fis l’effet insignifiant d’une mouche dans une chambre. Même à l’école, quoique je n’y fusse aimé de personne, on ne me traitait pas ainsi. Ma position médiocre, mon vêtement plus médiocre excitaient sans doute leur mépris ; mais je ne l’aurais pas cru tel. Simonov parut même s’étonner de me voir. (D’ailleurs, il s’était toujours étonné de me voir.) Tout cela me mit mal à l’aise. Je m’assis, j’avais l’humeur chagrine, j’écoutai la discussion sans y prendre part.

On discutait passionnément à propos d’un dîner d’adieu que ces messieurs voulaient offrir en