Page:Dostoievski - Les Pauvres Gens.djvu/197

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malheur si je n’ai pas trouvé à emprunter. Allons, c’est bien, je suis tranquille, je suis heureux pour ce qui vous concerne. Enchanté même de penser que vous ne m’abandonnerez pas, moi vieillard, et que vous resterez dans ce logement. S’il faut tout dire, eh bien, mon cœur a débordé de joie quand j’ai vu que vous parliez si bien de moi dans votre petite lettre et que vous rendiez pleine justice à mes sentiments. Je ne dis pas cela par orgueil, mais parce que je vois comme vous m’aimez, quand vous vous inquiétez ainsi de mon cœur. Allons, c’est bien ; pourquoi parler maintenant de mon cœur ? Laissons là le cœur ; — mais vous m’ordonnez, matotchka, de bannir la pusillanimité. Oui, mon petit ange, moi aussi je me dis qu’il ne faut pas être pusillanime ; mais avec tout cela, jugez vous-même, matotchka, comment serai-je chaussé demain pour aller au service ? Voilà le fait, matotchka ; et une idée pareille peut perdre un homme, le perdre complètement. Et surtout, ma chère, que ce n’est pas pour moi que je m’afflige, pour moi que je souffre ; personnellement je m’en moque ; quand je devrais sortir sans manteau et sans bottes par une gelée à pierre fendre, je supporterais fort bien cela,