Page:Dostoievski - Les Pauvres Gens.djvu/231

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femme bête, sans caractère ; il se peut aussi qu’elle soit réellement malade et qu’il n’y ait personne pour s’occuper d’elle. Eh bien, mais il faudrait s’adresser à qui de droit, Du reste, peut-être que c’est tout simplement une friponne qui, pour tromper les gens, envoie exprès un enfant souffreteux et affamé, au risque de lui occasionner une maladie. Et quelle éducation reçoit le pauvre petit garçon à qui l’on fait faire ce métier ? Il n’apprend qu’à haïr ; il va, court, sollicite. Les gens passent leur chemin, ils n’ont pas le temps. Ils ont des cœurs de pierre, leurs paroles sont dures. Arrière ! Sauve-toi ! Veux-tu t’en aller, polisson ! — Voilà ce qu’il s’entend dire par tout le monde, et son âme s’aigrit, et c’est en vain qu’il tremble au froid, le pauvre enfant effrayé, comme un petit oiseau tombé de son nid. Ses mains et ses pieds sont gelés, la respiration lui manque. Regardez, voilà qu’il tousse, le dénoûment est proche, la maladie comme un reptile immonde rampe vers sa poitrine : il est déjà marqué pour la mort dans quelque coin infect, sans soins, sans secours, — voilà toute sa vie ! Oh, Varinka, il est douloureux d’entendre ces mots « Pour l’amour du Christ » et de passer son chemin