Page:Dottin - La religion des Celtes.djvu/44

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
44
LA RELIGION DES CELTES

que l’exercice misérable d’un charlatanisme grossier ?

Les druides d’Irlande nous apparaissent surtout comme des magiciens, et des prophètes. Ils prédisent l’avenir, ils interprètent les volontés secrètes des fées, ils jettent des sorts. À l’aide de formules et d’incantations, ils peuvent trouver l’endroit où se cache une personne, accabler un ennemi de toute sorte de maux, faire lever entre deux armées un brouillard épais, faire tomber de la neige, changer le jour, en nuit, rendre grosse une femme stérile[1]. Ils connaissent les breuvages qui font oublier. Ils ont le pouvoir d’imposer des obligations, geis, dont il est impossible de s’écarter et rendre tabous certains objets. Ces geis sont très divers ; tantôt c’est un guerrier qui reçoit la défense de dire son nom à un adversaire ; Mael Duin ne peut emmener trois compagnons en sus d’un nombre déterminé par un druide ; il était interdit à Noïsé de venir en Irlande, en temps de paix sauf avec trois hommes : Cûchulainn, Conall et Fergus. Fergus avait reçu pour loi de ne jamais refuser une invitation et de ne pas quitter un festin avant qu’il ne fût terminé. Cûchulainn était obligé de ne jamais passer près d’un foyer sans s’y arrêter et y accepter à manger ; il lui était interdit de manger du chien. Les prédictions des druides ont pour objet tantôt la naissance, la gloire ou les malheurs futurs d’un enfant ; l’effet meurtrier d’une arme ; une vengeance dont un vaincu menace son vainqueur.

Il est rarement question de sacrifices en Irlande ; toutes, les mentions d’offrandes aux dieux ont été, semble-t-il, supprimées des textes irlandais ; mais on trouve dans les gloses le mot gaélique qui signifie victime et sacrifice et dans une Vie latine de saint Patrice, il est dit qu’à la Fes Temrach ou « Festin de Tara » non seulement les princes de tout le royaume, les grands et les chefs de provinces,

  1. H. d’Arbois de Jubainville, Cours de littérature celtique, t. I, p. 136-139.