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L’AUTEUR.


pas chercher en dehors des limites du Trégor. Non seulement la langue le prouve, mais l’évêché de Tréguier est expressément nommé dans la Vie de saint Patrice(1).

Quel est l’auteur de Louis Eunius ?

Le prologue du manuscrit B. N. 39 parle d’un jeune auteur de trente ans, de Bréhec en Plouha, qui a remis l’histoire en vers d’autre façon qu’elle était parce qu’il l’avait lue en français. Il est donc probable qu’il s’agit du livre du Père Boüillon, et que la rédaction remaniée par notre jeune auteur était celle que j’ai appelée la seconde rédaction, d’où il avait enlevé les épisodes romanesques relatifs à l’empereur et aux princes d’Hibernie. L’auteur de la première rédaction a des lettres™. Lorsqu’il met dans la bouche du sergent les mots : « Monsieur, sergent royal est ma condition dans la ville de Toulouse et partout dans le canton et la juridiction pour exécuter », il se souvient sans doute de quelque comédie classique du XVIII<’ siècle, peut-être même d’une *pièce représentée dans un collège. Il s’en souvient encore lorsque Louis, à l’exemple de Tartufe, dit : « Bonjour ma cousine, Dieu vous maintienne pleine de piété et de dévotion ». Théodosia s’écriant : « ô cruel inhumain, tigre que je caresse, cœur dénaturé », le paysan disant en mourant : « ô malheur achevé, ô fortune détestable », emploient sans aucun doute des formules de tragédie qu’avait retenues la mémoire du cloarek qui rédigea le Mystère de Louis Eunius.

LA LANGUE DU MANUSCRIT 45 <3>

Pour faire connaître la langue de Louis Eunius, il suffit de relever les particularités qui la différencient du breton littéraire W). Ce travail présente quelques difficultés ; car si nous pouvons, soit par les grammaires, soit par l’usage, connaître les dialectes (1) « Car j’ai été me promener par toutes les paroisses de l’évéché de Tréguier », dit Lucifer. J. Dunn, La Vie de saint Patrice, p. 1G2, v. 775-776. (2) Cf. dans M (récit de Louis Eunius) : « Cicéron, Aristote et Platon, malgré tout leur génie, malgré toute leur éloquence ne sauraient dire ni comprendre ce que je vis alors. » L’auteur de A cite le mene Hellas 2933. (3) J’ai aussi indiqué, à l’occasion, quelques formes de B et de D. Mais mon travail n’est pas une grammaire complète de A, qui aurait exigé un livre entier ; j’ai dû me borner le plus souvent è un catalogue de faits. (4) Pour déterminer ces particularités, je me suis servi du tome I des Leçons élémentaires de Grammaire bretonne, de F. Vallée, excellent ouvrage que je voudrais bien voir achever, et de la Grammaire bretonne du dialecte de Tréguier, par l’abbé L. Le Clerc, qui a bien voulu me fournir quelques indications de particularités dialectales. J’ai comparé souvent la langue et la versification de Louis Eunius avec celle des autres mystères récemment publiés : Cognomerus et sainte Trèfine, de A. Le Braz, Paris.