Page:Doumic - George Sand Dix Conferences sur sa vie et son oeuvre 1922.djvu/24

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lacunes. Ignorante, dénuée de lettres et d’usage, comme vous pouvez croire, elle a pour salon le palier de son logement, et pour relations ses voisines. Vous devinez ce qu’elle pense des aristocrates qui fréquentent chez sa belle-mère. Elle est impayable quand elle raille et quand elle parodie celles qu’elle appelle les « vieilles comtesses ». Car elle a de l’esprit naturel, une verve faubourienne, une gaminerie de gavroche, un talent pour les imitations qui est à mourir de rire. Bonne ménagère d’ailleurs, active, industrieuse, habile à tirer parti d’un chiffon, elle s’entend comme pas une à improviser avec rien une robe ou un chapeau qui a du chic. Elle a de la grâce, de la fantaisie au bout des doigts. C’est l’ouvrière parisienne, la fille des rues, l’enfant du peuple, et comme nous dirions : la midinette.

Telles sont les deux femmes qui se sont disputé le cœur d’Aurore Dupin. La destinée, qui les rapprochait, les avait faites pour se haïr. L’enfance de la petite Aurore fut le champ clos de leurs discordes. On peut dire