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carême

L’autre se démasque et s’adressant au duc Jean :

— Beau cousin, je vous demande la grâce de ce garçon, car le vrai coupable, c’est moi…

— Accordé, mon cousin ; je suis heureux de vous donneer ce gage de bonne amitié.

C’était le duc Louis d’Orléans, frère du roi, « un moult gentil et gai prince », dit une vieille chronique.

Pour récompenser Carême de la frayeur qu’il lui avait causée, le duc d’Orléans pria maître Thibaut de le lui céder.

Les prières d’un prince sont des ordres, et, tout en faisant la grimace, le rôtisseur se résigna à laisser partir son souffre-douleur.

Carême ne quitta plus son nouveau maître.

 

Un an après cette fameuse réconciliation, dans cette même rue Barbette, près de ce même hôtel Notre-Dame, Louis d’Orléans, revenant de chez la reine, était traîtreusement assassiné.

Seul de tous ses serviteurs, son écuyer le défendit jusqu’à ce que, percé de coups, il tomba sur son corps en criant :

— Mon maître !

Cet écuyer était le pauvre Carême !…

En échange du bon dîner qu’il avait reçu de lui, il donnait sa vie pour le « gentil prince ».