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dans la sierra

aveux, je suis forcé de t’envoyer en prison, dit l’alcade d’un ton de regret.

— La Maladetta ! c’est sur la dénonciation de cette misérable vieille.

— Elle est mieux placée que personne pour entendre ce qui se dit chez toi… ; d’ailleurs son récit a été conforme au tien, sauf l’histoire de la sacoche… »

Les gardes s’emparèrent du prisonnier.

Mercédès se cramponnait à lui avec des cris déchirants…

« Aie confiance, ma fille, Dieu ne permettra pas une si grande injustice. Sainte Madone, je vous confie mes pauvres enfants… »

Baisant les cheveux noirs de Mercédès, il la détacha doucement de lui, embrassa les petits qui pleuraient et s’adressant à la foule partagée entre la pitié et l’indignation :

« Par le sang du Christ, dit-il en levant la main vers le crucifix placé au-dessus de la porte, je jure que je suis innocent… Dieu fera connaître le vrai coupable. »


✽ ✽

« Eh bien, il ira donc aussi aux galères, l’honnête Diego » chevrota une voix aigre à l’oreille de Mercédès anéantie.

Une hideuse vieille, appuyée sur une béquille, sortait de la maison voisine.

Mercédès releva brusquement le front et reconnut la Maladetta, dont le visage respirait une joie féroce. Son fils était mort au bagne et elle se réjouissait de voir ceux qu’elle haïssait frappés à leur tour.

« Si mon père est condamné, ce sera par votre faute et vous aurez fait souffrir un innocent…

— Bah ! tous les criminels en disent autant », ricana la mégère, dont les cheveux gris se tordaient comme des vipères.