Page:Doyle - Du mystérieux au tragique.djvu/81

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Evelyn ne vous a-t-elle pas fait connaître la date de son retour ?

— Elle avait l’intention de rester à Londres quelques jours encore. Les dames, vous savez, pour peu qu’elles passent de temps à la campagne, ont vite un arriéré d’obligations mondaines. Et beaucoup des vieux amis de ma sœur se trouvent à Londres en ce moment.

— Elle est libre, et je ne veux pas déranger ses projets ; mais je serai heureux de la revoir. La maison me paraît vide sans elle.

— Je m’en doutais un peu, et c’est l’une des raisons qui m’amènent. Mon jeune ami le Docteur Hamilton s’intéresse si vivement aux questions dont vous avez fait votre domaine que je pensais bien ne pas vous contrarier en le priant de m’accompagner.

— Je mène une vie retirée, docteur Hamilton, et mon aversion pour les étrangers va toujours augmentant, confessa notre hôte. Je me suis demandé parfois si mon système nerveux ne laissait pas à désirer. Mes voyages de recherches m’ont conduit, dans ma jeunesse, en bien des pays insalubres où règne la malaria. Mais un confrère en entomologie est toujours le bienvenu, et vous me ferez le plus grand plaisir si vous voulez jeter un coup d’œil sur ma collection, que je puis, je crois, sans exagération, considérer comme la plus belle d’Europe.

Cela, certes, ne faisait aucun doute. Il possédait un vaste « cabinet » de chêne, disposé en tiroirs peu profonds, où s’alignaient, dûment classifiés et étiquetés, des scarabées de tous les coins du monde, noirs, bruns, bleus, verts, ou nuancés à l’infini. De ci de là, sa main glissait par-dessus les rangées d’insectes immobiles au bout de leurs tiges ; et saisissant un spécimen rare, le maniant avec la délicatesse et le respect qu’il eût montrés pour une relique, il m’en détaillait les caractéristiques, me disait les circonstances qui l’en avaient rendu possesseur. Oui, sûrement, il ne trouvait pas tous les jours un auditeur sympathique ; et il parla jusqu’à ce que, le crépuscule d’un