Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/161

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— L’abbé Fénelon[1] est venu avec moi, Sire, est-ce votre plaisir de le voir ?

– Sortez, sortez ! cria le roi avec colère, arpentant toujours la chambre à pas précipités.

Le Dauphin sortit et fut aussitôt remplacé par un long et maigre ecclésiastique d’une trentaine d’années, avec un grand air de distinction, et cette allure pleine d’aisance et de déférence que donne l’habitude des cours. Le roi s’arrêta, et le toisa d’un œil interrogateur.

— Bonjour, abbé Fénelon, dit-il, puis-je vous demander quel est l’objet de cette entrevue ?

— Vous avez eu la condescendance, Sire, en plus d’une occasion, de me demander mon humble avis, et même de m’exprimer combien vous en aviez été satisfait.

— Eh bien ? eh bien ? dit le monarque d’un ton impatienté.

— Si la rumeur dit vrai, Sire, vous êtes en ce moment dans une crise où un conseil impartial peut vous être précieux. Ai-je besoin de dire que ce serait…

— C’est bien, c’est bien ; pourquoi tant de discours ? cria le roi. Vous avez été envoyé ici par d’autres pour essayer de m’influencer contre Mme  de Maintenon.

— Sire, je n’ai reçu que des bontés de cette dame. Je l’estime et je l’honore plus qu’aucune dame en France.

  1. Fénelon, né en 1654, avait 32 ans, et il ne fut point précepteur du Grand Dauphin.