Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/34

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emballée allait se jeter avec son cavalier, et cette circonstance avait fait pour lui ce qui dix campagnes n’auraient pu faire. Aujourd’hui officier de confiance de la garde particulière du roi, jeune, brave et populaire, son sort était vraiment enviable. Et cependant, avec l’étrange perversité de la nature humaine, il était déjà fatigué de la routine magnifique mais monotone de ce service, et c’était avec regret qu’il pensait au temps où, s’il avait un service plus rude, il jouissait aussi d’une plus grande indépendance. À la porte même du roi, son esprit s’était isolé de la magnificence qui l’entourait pour vagabonder parmi les ravins sauvages et les torrents écumants du Far-West, quand soudain ses yeux se portèrent sur un visage qu’il avait vu dans ce décor même qu’évoquaient ses souvenirs.

— Ah ! monsieur de Frontenac, s’écria-t-il. Vous ne m’avez pas oublié ?

— Quoi, Catinat ! Ah ! c’est une joie vraiment de voir une figure de là-bas. Mais il y a un grand pas entre un subalterne du Corignan et un capitaine des gardes. Votre avancement a été rapide.

— Oui, et cependant je n’en suis pas plus heureux peut-être. Il y a des jours où je donnerais tout pour me revoir dansant sur les rapides dans une pirogue d’écorce ; ou pour retrouver encore ces collines rouges et jaunes à la chute des feuilles.

— Oui, soupira Frontenac. Vous savez que ma fortune a baissé pendant que la vôtre montait.