Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/382

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quart de mille il voyait s’avancer un petit bateau qui montait contre le vent. Le pavillon anglais flottait à l’arrière et ses mâts étaient pavoises. Sur le pont, on distinguait une foule monstrueuse poussant des cris de joie et agitant chapeaux et mouchoirs. Une ligne écarlate indiquait la présence à bord de nombreux officiers de la garnison.

En un instant, avec la perception vive d’un homme d’action, Craddock comprit tout.

Sharkey, avec cette ruse diabolique et cette audace surprenante qui constituaient le fond de son caractère, était en train de jouer pour son propre compte le coup de théâtre que lui-même, Craddock, eût produit s’il eût remporté la victoire. C’était en son honneur que les canons avaient tonné, c’était à lui que ces saluts avaient été adressés, c’était pour lui que les drapeaux flottaient. C’était dans le but de lui souhaiter la bienvenue que le gouverneur, le commandant de la place et les autorités de l’île approchaient en ce moment. Dans dix minutes, ils se trouveraient à portée des canons de l’Heureuse-Délivrance et Sharkey aurait obtenu une victoire telle que jamais un pirate n’en aurait gagné une semblable.

— Amenez-le ! s’écria le pirate au mo-