Page:Doyle - Un crime étrange.djvu/198

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homme, vous m’entendez, n’aurait agi différemment s’il s’était trouvé à ma place.

« Il y a vingt ans de cela, la jeune fille à laquelle je faisais allusion tout à l’heure allait devenir ma femme. Contrainte par la violence à épouser ce Drebber, sa vie et son cœur furent brisés du même coup. Mais tandis qu’elle gisait étendue sur son lit de mort, j’arrachai de son doigt son anneau de mariage et je fis le serment qu’au moment où je verrais agoniser devant moi le misérable auteur de sa perte, je lui présenterais cette bague pour mieux lui rappeler le crime dont il recevait enfin la juste punition. Depuis lors, cet anneau ne m’a jamais quitté et j’ai poursuivi sans relâche, à travers le nouveau et l’ancien continent, Drebber et son complice, jusqu’à ce que j’aie pu enfin les atteindre. Ils croyaient sans doute me lasser, mais combien ils se trompaient ! Si je meurs d’ici à peu, comme cela est bien probable, je mourrai au moins sachant que ma tâche en ce monde a été remplie et bien remplie, je m’en vante. Tous les deux sont morts et morts de ma main ! Après cela, que me reste-t-il à désirer ? Que me reste-t-il à espérer ?

« Ils étaient riches et moi j’étais pauvre, aussi il ne m’était guère facile de les suivre. Lorsque j’arrivai à Londres ma bourse était à sec et je fus obligé de chercher un métier qui me permît de vivre. Mener des chevaux, en monter, m’est aussi naturel que