Page:Dreyfus - Lettres d un innocent (1898).djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
LE CAPITAINE DREYFUS


Je souffrirai sans gémir le mépris si naturel, si justifié qu’inspire l’être que je représente, je comprimerai les convulsions de mon être contre un sort aussi épouvantable, aussi horrible.

Oh ! ce mépris autour de mon nom, autour de ma personne, comme j’en souffre ! La plume est incapable de traduire un pareil supplice.

Je me demande vraiment comment un homme qui a véritablement forfait à l’honneur peut continuer à vivre ? Mais je ne vis que grâce à ma conscience, grâce à l’espoir que bientôt tout se découvrira, que le véritable criminel sera puni de son horrible crime, qu’on me rendra enfin mon honneur.

Quand je serai parti, écris-moi bien longuement. Je pense qu’aussi à ce moment vous pourrez tous m’écrire et que je recevrai des nouvelles de tous les membres de nos familles.

Au premier envoi que tu feras, veux-tu être assez bonne pour ajouter la méthode Ollendorf que j’ai pu juger ici et que je trouve préférable à celle de ton professeur ? Tu y joindras le corrigé des thèmes qui forme un volume à part et qui sera aussi mon professeur.

Embrasse bien nos chéris, tes parents, tous ceux que tu vois enfin de ma part et reçois les baisers affectueux de ton dévoué

Alfred.
————