Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 1, 1901.djvu/119

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C’était Kléber qui lui criait :

« Eh ! gamin, viens ici me faire voir ta trompette ! »

Puis, quand le petit tambour se fut approché :

« Comment s’appelle-t-il, cet enfant-là ? demanda Kléber à Bernadieu.

— Jean Cardignac, dit Jean Tapin !

— Eh bien, mon petit gars, merci ! tu t’es bien conduit. Tu nous as tiré une belle épine du pied… Sans toi, nous serions peut-être là-bas à dormir pour longtemps… Bernadieu ! ajouta-t-il, vous porterez Jean Tapin à l’ordre de la neuvième. »

Jean rougit de plaisir et d’orgueil. Il en avait bien le droit, n’est-il pas vrai ?

« Tu dois être las ; va te coucher, reprit Kléber en lui donnant une poignée de main — et n’aie pas peur… je me souviendrai de toi, mon petit gars ! »

Fatigué, certes, il l’était, le petit tambour ! mais, énervé par l’émotion du combat, il rentra pourtant au pas de course, et sautant au cou de Catherine, toute pâle, mais toute heureuse de le voir vivant, Jean Tapin s’écria :

« Maman Catherine, je suis à l’ordre ! C’est le général qui l’a dit ! »

Malgré sa fatigue, Jean ne voulut se reposer qu’après avoir tout raconté à Catherine et à Belle-Rose qui, lui aussi, venait de rentrer sain et sauf.

Le tambour-maître, peu expansif cependant, l’embrassa.

« Tonnerre ! dit-il ; que je suis vraiment fier de toi, clampin ! que tu es superlatif, absolument superlatif ! Que je n’aurais jamais cru ça quand tu es arrivé à la neuvième. »

Et, sentencieux, il ajouta :

« Que c’est mon avis superlatif que, décidément, tu iras loin ! »

« Superlatif » était décidément le mot de prédilection du géant.

Quant à Lison, si elle n’assista pas au retour triomphal de son petit camarade, c’est — vous le comprendrez — qu’elle dormait bien tranquille, et que sa maman ne voulut pas la réveiller ; mais elle se rattrapa le lendemain.

Ne croyez pas que cette première opération bien que manquée eût abattu le courage des assiégés ; bien au contraire !

Les ennemis de la France savent parfaitement qu’ils nous calomnient lorsque (même encore aujourd’hui) ils crient sur tous les tons que le Français,