Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 1, 1901.djvu/124

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— Que j’obtempère à ton raisonnement, Belle-Rose ! appuya le vieux troupier.

— D’abord, reprit le tambour-maître, que nous devons être honorés d’une manière subséquente, puisque nous aurons ce soir le même rôti que le général Kléber.

— Comment ça ? dit Tapin.

— Oui, mon fiston ! nous avions, La Ramée et moi, récolté deux chats… Kléber il nous aperçoit en passant : « Que vous en avez une chance ! qu’il nous dit. Vous pourriez pas m’en céder un, Belle-Rose ? » qu’il nous fait. — Superlativement que si, général, que je réponds — rien à vous refuser. — « Merci, mon brave, qu’il reprend. Je dîne ce soir avec le général Aubert-Dubayet. Ça fait que j’apporterai mon plat ! nous avons déjà trois rats et une douzaine de souris. » — « Pour lorss, mon général, qu’a dit La Ramée, vous avez peut-être tort de mettre un chat avec… S’il allait les manger ? »

— Qu’alors Kléber il a ri comme tu penses, eh ! clampin ! Il a pris le chat, l’a attaché au sanglon de sa fonte, et il est parti en nous faisant cadeau de sa blague avec plein de tabac.

— Superlatif !… Superlatif !… conclut le géant… Dépouillons le gibier !

Il se mettait en devoir d’écorcher le chat, quand Catherine apparut.

Belle-Rose lui donnait les indications pour faire un pot-au-feu avec le malheureux matou, lorsqu’un boulet arriva en ronflant, atteignit en plein flanc la charrette de la cantinière et brisa la roue droite.

Carabi effrayé tirait sur sa longe et s’ébrouait.

Belle-Rose et La Ramée s’étaient retournés furieux vers l’ennemi, pendant que Catherine entraînait Jean et Lison derrière un pan de mur.

— Bon sang ! tas de Kaiserlicks ! Vous allez peut-être nous flanquer la paix !… Pas moyen de dîner tranquilles, pour lors ! s’écria La Ramée.

Mais un second boulet arriva et tomba plus loin, tuant deux hommes dans le cantonnement.

Une rumeur courut à travers la neuvième. Le colonel Bernadieu se précipita au milieu de ses hommes, accompagné du commandant Dorval.

— Du calme ! cria-t-il ; rassemblement en arrière de la première ligne de défense ; les capitaines y installeront le nouveau cantonnement.

L’ordre fut exécuté avec rapidité. Cinq minutes plus tard, la neuvième,