Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 1, 1901.djvu/352

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et l’histoire la cite à l’égal des plus brillantes conceptions tactiques. En passant à Kosbach, Napoléon fit démolir le monument commémoratif élevé par les Prussiens en souvenir de la victoire autrefois remportée sur nous ; puis à Potsdam, sur le tombeau du Grand-Frédéric, il prit l’épée du fondateur de la dynastie prussienne ; enfin le 27 octobre 1806, l’Empereur, à la tête de son armée, entouré de ses maréchaux et de sa Garde, fit à Berlin son entrée triomphale.

Pendant ce temps, ses lieutenants poursuivaient les débris de l’armée prussienne.

Ney et Soult prenaient Magdebourg.

Murat forçait le prince de Hohenlohe à capituler.

Le général Lasalle, à la tête de quelques hussards, sommait la place forte de Stettin de se rendre et la ville se rendait.

Murat et Lannes continuaient leur marche en avant vers le Mecklembourjx.

Bientôt il ne resta, de toute l’armée ennemie, que la division de Blûcher, de ce Blûcher qui, lui aussi, devait prendre sa revanche à Waterloo. Mais, le 7 novembre, Murat la força à capituler.

Ainsi donc, en trente jours, Napoléon avait conquis la Prusse et détruit entièrement son armée.

Eh bien ! mes enfants, souvenez-vous encore de ceci : pour vaincre les armées françaises en 1870, prendre Paris et occuper le tiers seulement du territoire français, les Prussiens durent mettre six mois.


Le service de Jean Tapin l’avait retenu à Berlin auprès de l’Empereur.

Depuis la bataille d’Iéna, depuis le : « Merci ! » que lui avait jeté Napoléon pour sa belle conduite, notre ami n’avait pas eu l’occasion de se retrouver en contact direct avec son héros. Il avait eu, il est vrai, des ordres à porter, mais il les avait reçus par l’intermédiaire du chef d’État-Major.

Or, un matin, Jean, habillé pour la première fois dans sa tenue d’officier de la Maison de l’Empereur, arrivait pour prendre son service au Palais, lorsque Napoléon, qui venait de monter à cheval pour se rendre à Postdam, l’aperçut :

— Bonjour, Jean Tapin, lui dit-il amicalement ; va trouver le capitaine de jour : il a un pli pour toi.

Laissant le lieutenant interdit, Napoléon partit au petit galop, suivi de Duroc et escorté d’un escadron de chasseurs.