Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 1, 1901.djvu/54

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Le général a mis douze hussards à ma disposition, pour transmettre à la colonne qui nous suit les renseignements recueillis et la nouvelle des événements survenus. Vous allez en prendre six que vous m’expédierez le cas échéant.

— Bien, colonel. »

Une heure plus tard, la neuvième, précédant deux autres régiments dont un de ligne, arrivant de Reims, se dirigeait vers Sainte-Menehould.

À trente-deux kilomètres de Châlons, près de l’auberge de la Lune, qui allait devenir quelques jours plus tard un des points importants du champ de bataille de Valmy, elle croisa un long convoi de pains et de fourrages, parti de Suippes, et dont le chef, un « ordonnateur ordinaire des guerres », avait en poche l’ordre signé Thouvenot de traverser les colonnes de troupes, et de ne se laisser couper par personne.

— L’adjudant général Thouvenot ! dit Dorval, c’est le bras droit de Dumouriez ; il n’y a qu’à attendre…

— Il faut que les vivres se fassent rares à l’armée du Centre pour que les combattants laissent passer les hussards de Lanchères… répliqua de Lideuil…

Les hussards de Lanchères était tout simplement les convoyeurs de charrettes de l’entrepreneur des vivres de la région de Metz, et c’est par dérision que les officiers les assimilaient aux braves cavaliers de Chamborand, le plus brillant des colonels de hussards de cette époque ; aujourd’hui encore, et en souvenir de cette appellation, vous entendrez appeler « hussards à quatre roues » les conducteurs des voitures du train.

La 9e brigade laissa donc passer l’interminable convoi, mais la nuit était venue, et, quelques kilomètres plus loin, au relai de poste d’Orbeval, près du château de Dommartin-la-Planchette, le colonel Bernadieu dut s’arrêter pour passer la nuit.

Le lendemain, à la pointe du jour, la marche fut reprise, et, à huit heures du matin, sans bruit de tambours, le régiment du colonel Bernadieu franchissait le pont de l’Aisne, et entrait à Sainte-Menehould.

C’était, et c’est encore aujourd’hui une coquette petite ville ; mais vous la connaissez mieux, j’en suis sûr, à cause de la manière ingénieuse et succulente dont elle prépare les pieds du compagnon de saint Antoine, que par ses vertus civiques.