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« Général ! c’est parce que j’avais entendu des coups de fusil… Je croyais que c’étaient les Prussiens. »

Dumouriez et Stengel se mirent à rire.

« Et tu avais tout de suite pris les armes ?

— Dame ! oui !

— C’est bien, mon petit gars ! C’est bien, reprit Dumouriez, en lui caressant la joue, mais tu peux dormir tranquille ; ce n’est qu’une petite escarmouche entre les patrouilles de nuit.

— Ah ! tant pis ! » dit Jean désappointé.

Les deux officiers généraux sourirent.

« Tu es brave, à ce que je vois ! dit Dumouriez ; quel âge as-tu ?

— Douze ans, général.

— Et tu t’appelles ?

— Jean Cardignac, ou Jean Tapin.

— Tu es tambour à la neuvième ?

— Oui, général.

— Allons ! c’est bien, je n’oublierai pas ton nom. Tu es un bon petit soldat. Va dormir.

Dumouriez, suivi de son escorte, continua sa ronde nocturne, et Jean rentra se coucher, la tête remplie de visions de combats.

Au reste, il n’eut pas occasion de calmer son impatience pendant les journées qui suivirent.

L’ennemi semblait rempli de prudence. Redoutait-il d’attaquer les formidables positions de Grand-Pré ? Était-ce, de sa part, une tactique ?

Toujours est-il que, jusqu’au 10 septembre, il n’y eut pas de vrai combat entre nos troupes et les siennes.

Il ne fut livré que quelques escarmouches d’avant-postes, que nos soldats repoussèrent victorieusement.

Le 11, une attaque générale se dessina pourtant de la part de l’ennemi, qui fut vigoureusement repoussé. Il n’y eut qu’une partie des troupes françaises engagée : les brigades des généraux Miranda et Stengel.

La 9e demi-brigade qui, comme toute l’armée, avait pris les armes, resta placée en réserve, au grand désappointement du petit Jean.

Cependant, grimpé sur une roche, il put voir, mais de loin, l’action engagée.