Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/167

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ne pas essayer d’entraîner là-bas le Patrie avec nous ? Ce sera la France au Pôle, sans contestation cette fois.

Cette réflexion était absurde au premier abord, car six personnes, dont deux femmes, étaient incapables d’entraîner à six ou sept kilomètres de là une masse comme la nacelle, dont la béquille raclerait profondément la glace et formerait frein d’une façon continue.

Et cependant cette idée absurde devait être le salut de l’expédition.

Tant il est vrai que le salut, dans certaines circonstances désespérées, vient souvent du côté d’où on l’attend le moins.

Le savant ajouta :

— Il y a là-bas, dites-vous, un ressaut de glace d’une quinzaine de mètres ; c’est un abri tout trouvé pour l’aérostat, peut-être même un moyen de le fixer…

La falaise, un abri pour le Patrie !

Et Georges Durtal interrompit aussitôt ses recherches pour suivre cette idée qui répondait si bien à sa principale préoccupation. Que le vent se mît à souffler dans ce désert sans relief, et aucune force ne retiendrait le Patrie, dont l’ancre ne mordait pas dans la glace plane de la banquise.

Dans cette plaine immense, l’énorme masse était exposée à tout instant, et le moindre souffle l’emporterait. Là-bas, au contraire, contre la haute paroi de glace, on pouvait espérer en rester le maître pen-