Page:Drieu la Rochelle - Le Feu Follet (1931).pdf/7

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

briquet. Les deux cigarettes grillèrent. La cérémonie était finie, il fallait parler.

D’ailleurs, cela ne les gênait plus comme autrefois ; ‬chacun d’eux, n’ayant plus peur de se montrer, en était au point de trouver la réalité de l’autre déjà courte, mais encore savoureuse ils avaient couché ensemble peut-être douze fois.

— Je suis contente, Alain, de vous avoir revu, un instant, seul.

— Votre séjour aura été un peu bousculé.

Il ne cherchait pas à s’excuser de ce qui était arrivé. Et elle ne lui en faisait pas grief ; ‬du moment qu’elle était allée vers lui, elle risquait de pareils incidents. Pourtant, ne faisait-elle pas un petit effort secret pour se persuader que sur trois jours à Paris, avec Alain, elle devait en passer un à la préfecture de police, après avoir été ramassée avec lui dans une tanière d’intoxiqués ?

— C’est vrai, c’est ce matin que vous partez, ajouta-t-il, d’une voix légèrement voilée de dépit.

Elle repartait avec le Léviathan, sur lequel elle était arrivée. Mais pour cela, il lui avait fallu téléphoner toute la soirée précédente, car elle n’avait pas réservé, dès New York, sa place de retour, bien qu’elle eût déclaré alors qu’elle ne ferait que toucher Paris. Est-ce que ç’‬avait été négligence ou secrète idée de rester ? Dans ce cas, c’était sans doute l’incident policier qui l’avait décidée à repartir, cette nuit passée sur