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II


Ce fut la plume d’un journaliste qui tua cet Empire naissant à peine.

C’est une singulière figure encore que celle de M. Henri Rochefort ; et il faut, pour bien dégager ce type, tenir compte des innombrables variétés d’êtres et d’idées qu’ont semées dans ce pays tant de régimes, d’invasions, de passages de nations, d’incarnations humaines différentes, laissant de leur graine. Semblables à ces arbres qui revivent après des années écoulées, dans un coin de la forêt, parce qu’un germe d’eux-mêmes, déposé sur le sol, s’est conservé et développé, certaines formes d’êtres lointaines reviennent parfois tout à coup dans toute l’originalité première.

Rochefort, c’est le féodal.

Ce n’est pas le grand seigneur, le marquis, le gentilhomme déchu ; c’est le féodal, non point croyant, dévoué, à l’âme enfantine et pure, mais le féodal possédé du diable, le féodal blasphémant comme on en vit en plein siècles de foi, disant, comme Raoul de Cambrai : « Vous planterez ma tente au milieu de l’église, vous ferez mon lit devant l’autel, vous mettrez mes faucons sur le Crucifix d’or. »

Comme les féodaux d’autrefois, il s’élance chaque matin de son journal ainsi que d’un burg, frappe au hasard et revient.

C’est un inconscient, c’est un sauvage, c’est tout ce qu’on voudra de mauvais, de funeste, d’irritant, mais ce n’est pas un Juif. Pour le Juif, Rochefort n’éprouve guère que le sentiment de répulsion presque physique du Moyen Age.

Figurez-vous un Béni-Israël quelconque, happé sur