Page:Drumont - La France Juive édition populaire, Palmé 1885.djvu/553

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Près de lui se tenait la pauvre femme enceinte qui avait voulu accompagner son mari, et qui essuyait avec un mouchoir la sueur déjà glacée qui coulait de son front.

Alors on vit cette chose qu’on n’avait jamais vue en France : tandis que les assassins, sûrs de l’impunité, se pavanaient dans la salle, un horrible coquin, l’avocat général Bissaud, insultant, raillant cet homme qui râlait déjà, affirmant que les assassins avaient bien agi et que Saint-Elme « jouait la comédie ».

De la foule sortit une protestation indignée pendant que Bissaud s’asseyait en ricanant. Saint-Elme fit un effort pour répondre à cet infâme ; il n’y put parvenir. Quelques heures après, il était mort.

Ces faits monstrueux sont dans toutes les mémoires. La discussion à la Chambre de l’interpellation de l’extrême gauche sur les affaires de Corse jeta sur nos mœurs publiques une aveuglante lumière. Assassinat par des bravî payés par le préfet, fraudes électorales, corruptions de tout genre, secours distribués pour la perte dun bétail qui n’avait jamais existé, tout était là.

M. de Douville-Maillefeu, en voyant monter vers le gouvernement cette marée de boue, semble avoir éprouvé cette admiration qu’on éprouve devant certains déchaînements de la mer, et cria avec une sorte de transport : « Qu’on dise tout ! que la honte coule à pleins bords ! »

La Chambre n’eut même pas un blâme platonique pour les Trémontels et les Bissaud, et vota l’ordre du jour pur et simple.

Rien ne fut singulier comme l’attitude de Brisson l’incorruptible. Toutes les fois qu’on essaye de dénoncer à la tribune quelques-unes de ces prévarications de ministres ou d’hommes publics, qui sont évidentes