Page:Drumont - La France juive, tome premier, 3eme édition, 1886.djvu/442

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tout conduit et conduit tout sans avoir vu le Juif, sans deviner son rôle une minute, sans soupçonner ce que peut contenir de haine contre la vieille société française, contre l’aristocratie, contre le Christ, le cœur d’un Juif allemand, dont les pères ont été pendus entre deux chiens. Si le Juif lui est apparu, ce n’est guère que sous la forme d’un baron déjà débarbouillé, fort honoré d’être en pareille compagnie et s’y tenant à peu près convenablement ; il ne s’est pas douté que celui qui venait de l’appeler obséquieusement « mon cher duc » soudoyait les insulteurs qui allaient criant par les rues : « Demandez la banqueroute de l’Union générale, le suicide de M. Bontoux, l’arrestation du prince de Broglie ! »

Si on interrogeait sur la question juive l’ancien ministre des affaires étrangères, on retrouverait évidemment chez lui les théories tolérantes et larges que lord Macaulay, qui fut un orateur applaudi et un fin lettré, comme le duc de Broglie, développait, en 1831, dans son Essai sur les incapacités politiques des Juifs.

Avec moins d’éloquence et de mérite, la plupart des membres de la droite vivaient comme le duc de Broglie, dans la même sphère irréelle. Je gage bien que le vicomte Othenin d’Haussonville, par exemple, ne savait pas, quand il était député, le quart de ce qu’il a appris en allant parcourir les garnis, les bouges et les bals publics, pour son beau livre de l’Enfance à Paris.

Le premier qui s’occupa sérieusement des questions ouvrières, au point de vue conservateur et chrétien, fut un soldat. Pourquoi ? Parce que ce soldat avait vu la Commune de près, parce que le métier militaire, qui fait vivre au milieu de toutes les classes de la société rassemblées, met de suite un homme de la valeur du comte de Mun en face de