Page:Drumont - La France juive, tome premier, 3eme édition, 1886.djvu/71

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Parmi ces dispersés de la famille d’Israël, les Falachas sont peut-être les plus intéressants.

Ils habitent, dit M. Joseph Halévy dans son rapport sur sa mission en Abyssinie, dans les provinces de Chiré, d’Adubo, d’Arguedié, dans le nord, leur teint est noir sans être nègre, ils portent ou des noms hébreux prononcés d’après l’habitude abyssinienne, ou des noms de circonstance, selon la coutume des anciens Hébreux et de la race Queez. Ils prétendent être les descendants des délégués juifs qui formaient un cortège d’honneur pour Maqueda, la fameuse reine de Saba et pour son fils Menilek qui avait le roi Salomon pour père.

Les Abyssins parlent sans cesse de Jérusalem et comptent bien sur la restauration de la nationalité juive.

Quoique les Juifs ne soient guère tendres pour nous, l’histoire d’un exode manqué de ces pauvres gens m’a ému malgré moi. Un jour, Théodoros couche en joue un prêtre Falachas. Épouvantés les malheureux se décident brusquement à se mettre en route pour cette Jérusalem dont le nom revient continuellement dans leurs entretiens. Ils abandonnent leurs cabanes, les vieillards prennent la tête de la caravane en chantant des hymnes et en agitant des branches d’arbres. Personne ne se doute dans la troupe de ce que c’est que le vaste Univers, ils s’attendent tous à rencontrer la mer Rouge et à la franchir à pieds secs comme ont fait leurs pères. Bientôt ils succombent de fatigue, ils voient l’espace s’élargir toujours devant eux, exténués ils s’arrêtent à Axoum, dans le Tigré, et prennent le parti de revenir en arrière.

Hélas ! Les hyènes et les scorpions ont pris possession des huttes abandonnées. Pour punir les fuyards on veut leur arracher leur Pentateuque et ils sont obligés de sacrifier leur dernière vache pour sauver leur précieux livre.