Page:Du Bellay - Œuvres complètes, édition Séché, tome 2.djvu/228

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Par le voulté de ce front tout serain :
Et ces deux yeux d’une fuite su•^•ic
Entre les mains du Moteur souverain
Firent mouvoir la sphère de ma vie.

X

Jay entasse moy-niesme tout le bois,
Pour idiumer ccste flamme immortelle,
Par qui mon amc avecques plus haute aile
Se guindé au ciel d"uu égal contre-pois.
Jà mon esprit, jà mon cœur, jà ma voix,
Jà mon amour conçoit forme nouvelle
D’une beauté plus parfiiitement belle,
Que le fin or espuré par sept fois.
Rien de mortel ma langue plus ne sonne :
Jà peu à peu moy mesme j’abandonne,
Par ccste ardeur, qui me fait sembler tel.
Que se monstroit l’indonté fils d’Alcmene,
Qui dédaignant vostre figure humaine,
Brusla son corps pour se rendre immortel.

XI

Pour affecter des Dieux le plus grand heur,
Et pour avoir, ô sacrilège audace !
Sous le mortel d’une immortelle grâce
Idolâtré une saiucte grandeur :
Pour avoir pris de la céleste ardeur
Ce qui de moy toute autre flamme chasse,
Je sens mon corps tout hérissé de glace
Contre le roc d’une chaste froideur.
L’aveugle oyseau, dont la perçante flamme
S’affile aux rais du soleil de mon ame
Aguise l’ongle, et le bec ravissant.
Sur les désirs, dont ma poictrine est pleine,
Rongeant mou cœur qui meurt en renaissant,
Pour vivre au bien, et mourir à la peine.