Page:Du Camp - Paris, tome 1.djvu/29

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quand je reconnais que les Halles, déjà insuffisantes, sont réduites à déborder dans les rues voisines, quand je m’aperçois que le ridicule temple grec où s’agite la Bourse est manifestement trop étroit pour la foule qui s’y entasse, lorsque je suis obligé de faire en voiture le tour du palais et du jardin des Tuileries pour aller de la rue de la Paix à la rue Bellechasse, lorsque je suis contraint, sous peine d’être écrasé, de m’arrêter et d’attendre un quart d’heure avant de pouvoir traverser le boulevard Montmartre, quand le souffle empesté des fosses communes chasse la maladie vers nous, malgré les ordonnances et les lois qui si sagement excluent les cimetières de l’enceinte des villes, je me dis qu’il reste bien des choses à faire, bien des voies nouvelles à percer, bien des établissements à construire, bien des améliorations à apporter à l’état matériel de Paris, et que ce serait un grand bienfait pour la capitale de la France, si on l’avait enfin délivrée de tous ces vestiges du passé qui l’embarrassent encore et lui ôtent une partie de la splendeur qu’elle est en droit de réclamer.

Au siècle dernier, on eût chansonné le préfet de la Seine : « Tout finit par des chansons, » dit le vaudeville du Mariage de Figaro ; mais depuis qu’on a chanté le Ça ira, on est moins fertile en couplets. On se contente aujourd’hui de fronder, de narguer, de plaisanter ; en attendant, on profite d’un Paris nouveau, large, étincelant, salubre, et l’on fait bien.

J’ai pu voir, j’ai pu étudier le plan du Paris futur, du Paris rêvé, du Paris tel qu’il serait si les travaux entrepris et projetés étaient menés à bonne fin : j’en suis resté ébloui. Ce serait vraiment alors la première ville de l’univers, et bien mieux encore que l’ancienne Rome, la ville par excellence : Urbs.

Verrons-nous cela ? Je ne sais ; mais il est à souhaiter que ceux qui nous suivront puissent le voir.