Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/119

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il leur semble que le jeune homme qui accompagnait son bagage a parlé de Marseille. On vérifie aussitôt le livre de police des messageries et l’on y trouve qu’un nommé Viou a retenu une place pour cette ville ; mais il a perdu ses arrhes, a retiré ses effets et n’est point parti.

Viou était-il un pseudonyme ou un vrai nom ? On interroge les sommiers judiciaires, et on y acquiert la certitude qu’un condamné de ce nom est en détention à la maison centrale de Melun. On le questionne, et l’on apprend qu’il est le père du domestique assassin. Une recherche analogue est faite sans désemparer dans les bulletins des garnis ; le nom de Viou y est inscrit. On se transporte au domicile désigné, rue du Pont-Louis-Philippe ; Viou doit venir y coucher le soir ; on établit une surveillance et l’on s’empare de lui au moment où il rentre. Les commissionnaires médaillés, les registres des messageries, les sommiers judiciaires, les bulletins des garnis, en aidant à reconstruire l’individualité, ont mis sur les traces du criminel et l’ont, pour ainsi dire, livré au service de sûreté ; celui-ci, abandonné à ses propres ressources, se serait fort probablement égaré en recherches vaines et le crime fût resté impuni.

À la masse de renseignements qu’elle a toujours sous la main, à ceux que ses agents recueillent, il faut ajouter ceux qui lui sont transmis par voie indirecte ou inconnue. Le fait est à peine croyable, et cependant il est hors de doute. La préfecture reçoit quotidiennement une quantité énorme de lettres qui lui donnent des avis vrais ou supposés. Les secrétaires spéciaux, ceux que l’on appelle assez spirituellement les écosseurs, n’ont point assez de leur matinée pour décacheter tous les plis qui leur parviennent et les diriger vers les services qu’ils intéressent. Il y a à Paris des personnes qui ne se coucheraient pas sans avoir écrit au préfet de police