Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/183

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vocat qu’il ne peut rien dire contre sa conscience ni contre le respect qui est dû aux lois ; ensuite il lit la belle formule du serment imposé au jury, qui l’écoute debout, et chaque juré individuellement nommé dit en levant la main : « Je le jure[1]. »

Le président avertit l’accusé qu’il ait à être attentif, et le greffier, à très-haute voix, lit l’acte d’accusation, avec ces inflexions monotones et traînantes familières à ceux qui répètent pour la millième fois peut-être des formules dont ils savent tous les termes, ensuite on fait l’appel des témoins, qui sortent immédiatement de la salle d’audience et sont enfermés dans une chambre qui leur est spécialement réservée. L’accusé se lève sur l’ordre du président, et l’interrogatoire commence.

Il est rare que l’accusé, qui a eu de longs jours de solitude et de réflexion pour se préparer à subir cette terrible épreuve, ne fasse bonne contenance ; mais un phénomène physique qui se produit invariablement indique à des yeux exercés la force des sensations qu’il cherche à dominer. Toute émotion déprimante agit directement sur les glandes salivaires, dont elle neutralise en partie les sécrétions ; dès lors elle provoque un mouvement de déglutition répété et qu’on peut suivre sur le cou de l’accusé par le va-et-vient perpétuel de la pomme d’Adam. Cet os hyoïde, qui descend et remonte sans cesse, qui semble faire un effort pour arrêter les paroles au passage, est parfois si violemment agité qu’on le dirait pris de convulsions.

  1. Voici la formule ; si je ne me trompe, elle a été libellée par Duport : « Vous jurez et promettez devant Dieu et devant les hommes d’examiner avec l’attention la plus scrupuleuse les charges qui seront portées contre N… ; de ne trahir ni les intérêts de l’accusé, ni ceux de la société qui l’accuse ; de ne communiquer avec personne jusqu’après votre déclaration ; de n’écouter ni la haine, ni la méchanceté, ni la crainte ou l’affection ; de vous décider d’après les charges et les moyens de défense, suivant votre conscience et votre intime conviction, avec l’impartialité et la fermeté qui conviennent à un homme probe et libre. « (Inst. crim., 312.)