Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/198

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sur le théâtre : vieilles procédures aux formes compliquées, qui dorment là dans leur vêtement de grosse toile et que nul doigt de procureur ne feuillettera plus. Quelques-uns de ces sacs, bourrés jusqu’à l’ouverture, sont plus amples que ceux où les paysans enferment le blé ; d’autres, fort modestes, ressemblent à des sacs de 500 francs. Près de ces débris d’un autre âge, j’aperçus une lourde liasse isolée, sur laquelle je pus lire : Liste générale des émigrés.

Le greffe de la cour impériale est riche en causes criminelles. Il existe là, dans ces vastes greniers, au milieu de ces monceaux de paperasses, rangés avec un ordre minutieux, des richesses historiques sans prix, auxquelles nul ne peut toucher, car les recherches sont sévèrement interdites aux greffes du palais. Bien des énigmes ont là leur solution, perdue dans le fatras des dossiers ; bien des pièces autographes et curieuses sont annexées aux mémoires à consulter ; bien des lettres de hauts personnages sont mêlées aux requêtes grossoyées. Est-ce que tout cela restera éternellement enfoui dans les greniers du Palais de Justice, et les archives de l’empire ne devraient-elles pas rendre à l’étude et mettre en circulation tant de documents inédits, inconnus et intéressants[1] ?

J’ai essayé de raconter les rapports qui existent entre la justice et les coupables, limitant mon étude à la cour d’assises, afin de ne point toucher aux choses de la vie privée et de mieux mesurer la profondeur de l’abîme que la loi a franchi depuis la Révolution française. Aujour-

  1. De tant de richesses il ne reste plus rien. Les envieux malfaisants qui ont cru pouvoir neutraliser l’œuvre de la justice en brûlant les greffes ne se doutent pas qu’ils ont causé un préjudice irréparable à l’histoire, dont du reste ils ne se soucient guère. L’incendie du Palais de Justice et de tous les documents qu’il renfermait nous fait amèrement regretter que ceux-ci n’aient point été, comme nous le demandions, rassemblés aux Archives, qui du moins ont été épargnées par les fous de la Commune.