Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/383

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beur auquel elles se livrent, par pur esprit de charité et de commisération. Semblables à un plongeur qui se jetterait dans un océan d’immondices pour y trouver une perle, elles descendent dans les bas-fonds les plus corrompus de notre civilisation décomposée pour y découvrir un être tombé qu’elles puissent ramasser, redresser et soutenir. Dans le troupeau humain, elles ne cherchent que la brebis galeuse. C’est au centre même de l’infection morale et matérielle qu’elles ont établi leur lieu de prédilection ; c’est dans l’infirmerie de Saint-Lazare, dans les salles gangrenées de Lourcine qu’elles vont s’asseoir au chevet des malades, qu’elles leur racontent l’histoire de Marie de Magdala, qu’elles leur parlent de Celui dont le souffle a chassé les démons, qu’elles affirment que l’innocence perdue peut se reconquérir ; qu’elles donnent des asiles à ces pauvres âmes alourdies par le vice et les aident à s’envoler vers les régions de l’idéal, où l’on retrouve la conscience de soi-même et l’espoir d’une vie meilleure. Il est facile d’aller visiter les indigents, de leur porter des vêtements et du pain, de panser la plaie des infirmes, de secourir les affligés ; mais il faut un cœur bien gonflé de vertu et brûlant de bien belles ardeurs pour fouiller dans le dédale de toutes ces impuretés, et y ressaisir les pauvres filles que le monstre n’a pas encore dévorées tout entières.

Les dames du Bon-Pasteur sont attachées à leur œuvre avec passion ; les difficultés sans nombre dont elle est entourée semblent avoir centuplé leur énergie ; mais c’est en vain qu’elles voudraient faire plus : comme l’ouvroir de Notre-Dame de la Miséricorde, elles sont forcées de s’arrêter là où l’impossibilité commence. C’est la pauvreté, la pauvreté seule qui les contraint à ajourner des actions de salut que le moindre retard peut rendre inutiles. Ne rencontrera-t-on pas un vieil-