Page:Du Camp - Paris, tome 3.djvu/80

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour faire d’un excellent soldat un sergent de ville passable qui ne durera guère que douze ou quinze ans. Leur devoir, — et chacun des ordres du jour qui leur sont adressés le leur répète sous toutes les formes, est de faire respecter les règlements sans jamais mécontenter la population, tâche spécialement difficile avec un peuple aussi nerveux que celui de Paris, et dont cependant on doit reconnaître qu’ils ne se tirent pas trop mal. À force de vivre dans les mêmes quartiers, et c’est en cela que la mesure inaugurée après le décret de 1854 est excellente, — ils en connaissent tous les habitants, peuvent faire plusieurs observations aux délinquants avant de leur déclarer contravention. Aux habitudes agressives d’autrefois, excusables jusqu’à un certain point chez des agents clair-semés, se hâtant trop parce que le temps leur manquait toujours pour prévenir et qu’ils avaient à peine celui de réprimer, a succédé, grâce au grand nombre et à la diffusion raisonnée des sergents de ville, une sorte de gronderie familière qui avertit plutôt qu’elle ne menace.

Pour les ivrognes ils sont admirables ; ils les traitent avec une douceur indulgente qui n’est peut-être pas dénuée d’une certaine jalousie naturelle chez des hommes à qui l’ébriété même est sévèrement défendue ; ils les arrêtent, ceci n’est pas douteux, mais en vertu d’instructions secrètes dans lesquelles il est dit : « N’oubliez pas que vous ne devez arrêter les ivrognes que pour assurer leur propre sécurité et pour éviter les accidents qui pourraient les atteindre dans nos rues encombrées. Aussitôt que leur ivresse sera dissipée, vous les mettrez en liberté, à moins qu’ils n’aient commis quelque délit. » En somme, ils vivent en bons termes avec la population, quoiqu’ils soient en horreur aux vieilles commères dont ils forcent les chiens à être muselés. Ils doivent veiller à la sûreté de la voie publique,