Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/254

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médiocrité domine. Lorsqu’une femme de chambre est si sotte qu’elle ne peut rester en condition, elle entre dans un petit théâtre, et pourvu qu’elle puisse, en dansant, lever la jambe au-dessus de sa tête, elle devient célèbre, et peut-être riche. Il n’y a pas une grande ville au monde où de pareilles aberrations ne se produisent ; c’est être injuste que de les reprocher exclusivement à Paris. Ce n’est pas ici seulement que le général Tom Pouce a fait fortune.

À part ces erreurs dont nulle portion du genre humain n’est exempte, Paris est assez équitable dans ses appréciations ; il accepte et paye les services de ceux qui concourent à satisfaire ses besoins. S’il repousse les ouvriers, comme on l’en accuse, pourquoi donc s’y précipitent-ils de tous côtés ? Est-il responsable des espérances folles, des ambitions désordonnées, des illusions extravagantes ? Parce que Rachel gagnait 200 000 francs par an, est-ce une raison pour que les élèves du Conservatoire soient millionnaires ? Dans cette irritante question que les mauvais instincts ont envenimée, on ne voit que la fortune du voisin et jamais on ne considère l’intelligence qu’il a déployée, les efforts qu’il a renouvelés, les vertus qu’il a mises en œuvre pour l’acquérir. À regarder vers l’Institut, vers la haute finance, vers la grande industrie, vers les sommets de la hiérarchie administrative et militaire, je reconnais des hommes qui se sont forgés eux-mêmes, et qui sont nés le pied sur le dernier échelon.

Certes, celui qui gagne sa vie au jour le jour traverse parfois de rudes épreuves, et lorsque les chômages s’abattent sur les ateliers, la situation de l’ouvrier est singulièrement douloureuse ; il la partage, dans une certaine mesure, avec tous, car tous ressentent le contre-coup des événements extérieurs ; diminution de la fortune publique, diminution des fortunes particulières,