Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/367

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restée la même, par conséquent les mœurs n’ont point varié. On a vécu sous tous les régimes imaginables, et le Français n’a point cessé d’être identique à lui-même.

Si la décadence n’est simplement qu’une question de race, ainsi que l’on aime à le répéter, comment se fait-il que cette décadence semble atteindre spécialement les nations catholiques ? L’Italie, le Portugal, l’Espagne, l’Amérique du Sud, la France ne sont point en prospérité, je l’accorde volontiers, et la mère de ces peuples, c’est la race latine ; mais celle-ci n’a rien de commun avec l’Autriche, avec la Pologne, avec l’Irlande. Comment se fait-il que les nations protestantes vivent, s’affirment, fleurissent, fondent des colonies qui deviennent des États de premier ordre, et que les nations catholiques, malgré leurs richesses, leur climat admirable, la fertilité de leur sol, leurs vertus chevaleresques, l’élégance et le charme de leur esprit, soient toutes, sans exception, atteintes d’un mal de langueur ? Il y a là un fait considérable et dont l’histoire tiendra compte un jour.

Lorsque l’on puise en soi-même, par le libre examen, le sentiment du devoir, on est responsable vis-à-vis de sa propre conscience et le devoir est facile à accomplir ; mais quand on le reçoit d’autrui, en vertu d’une délégation de la puissance divine, qu’on appelle l’infaillibilité et qui entraîne l’obéissance passive, quand il est imposé, en un mot, on ne cherche qu’à s’y soustraire. Le premier fait est celui du protestantisme, le second celui du catholicisme ; on peut voir où ces deux principes si différents l’un de l’autre, si féconds en résultats opposés, ont conduit les nations qui professent ces deux religions[1].

  1. J.-J. Rousseau a nettement formulé cette vérité dans ses Confessions lorsqu’il dit : « Les protestants sont généralement mieux instruits que les catholiques. Cela doit être. La doctrine des uns exige la discussion,