Page:Du Camp - Paris, tome 6.djvu/368

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Il faut respecter même les mauvaises lois, disait Franklin, car elles nous servent à en obtenir de meilleures. » Ce précepte protestant n’aura jamais cours dans le peuple de Paris, car on dirait que le premier besoin de celui-ci est de se soustraire à l’action des lois et de les briser violemment. Les fictions parlementaires et constitutionnelles n’ont pour lui aucune importance, et jamais il ne les a comprises. Lorsqu’il se lève, ce n’est point pour obtenir une modification ministérielle ou législative, c’est pour faire table rase de ce qui est ; il porte le coup directement au représentant le plus élevé de l’autorité, au souverain lui-même, et le renverse.

La légalité lui est absolument inconnue ; au fond, comme tous les peuples à tempérament militaire et féminin, il ne croit qu’à la force, surtout quand il est le plus fort. Aussi notre histoire a vu, depuis quatre vingt-dix ans, une série de légalités adverses s’établir par la violence : le 4 septembre est aussi légal que le 2 décembre, le 2 décembre est aussi légal que le 24 février, le 24 février est aussi légal que le 29 juillet, et ainsi de suite, en remontant le cours de nos annales contemporaines jusqu’au renoncement du 4 août 1789, qui seul fut légal, car il a été volontaire et spontané. Qu’a-t-il manqué à la Commune pour être légale à son tour ? De n’avoir pas été vaincue. C’est là une misère inéluctable, inhérente à notre état social, qui n’a point de pondération, inhérente à notre état moral, qui re-

    celle des autres la soumission ; le catholique doit adopter la décision qu’on lui donne, le protestant doit apprendre à se décider. » Il y a longtemps que des esprits éminents ont prévu et prédit l’avènement politique du protestantisme en Europe. Montesquieu, dans les Lettres persanes (lettre CXVII), a écrit : « Avant l’abaissement de la puissance d’Espagne, les catholiques étaient beaucoup plus forts que les protestants. Ces derniers sont parvenus à peu près à un équilibre. Les protestants deviendront plus riches et plus puissants, et les catholiques plus faibles. »