Page:Du Deffand - Correspondance complète de Mme Du Deffand avec ses amis, tome 1.djvu/276

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Tourbes, chercher ; je vous promets que vous pouvez la mettre au pis. Sérieusement, il n’y a qu’a répondre à toutes les fantaisies par en rire et par dire que vous les trouverez excellentes, pourvu que l’on vous permette, de votre côté, de suivre les vôtres ; car c’est ainsi que, par grandeur d’âme, vous nommerez les vues sages, droites et uniformes qui déterminent vos actions.

Voilà deux lettres que je vous envoie, l’une de monsieur votre frère, et l’autre de madame de Saint-Pierre[1] ; je n’ai ouvert ni l’une ni l’autre.

Il est fâcheux que la fatigue ne fasse que vous échauffer le sang, et ne vous procure point de sommeil ; mais quand les eaux auront commencé à vous rafraîchir, cela se retrouvera, et la nécessité de se coucher de bonne heure, jointe au régime et à un peu plus d’exercice, doit vous remettre du calme.

On disait hier que le contrôleur général avait en une mauvaise nuit, et on se moqua bien de moi, de l’inquiétude où j’avais été pour Mertrud, et de ce que j’avais entrepris cette cure ; En tout cas, si cela ne fait pas le médecin, cela fera le guérisseur malgré lui.

Je compte que vous m’accuserez la réception de mes lettres. Je crains l’irrégularité des postes ; celle-ci est la cinquième depuis votre départ ; surtout n’ayez pas l’indifférence de les laisser traîner.

Vous me demandez des nouvelles de ma santé ; elle est assez bonne, mais je mange trop, et je fais tous les matins un vœu de moins manger le soir, que je viole à chaque souper : hier, quand tout le monde fut en allé, je me promenai une heure tout seul dans mon jardin.

Bonjour, je vous embrasse ; et je vous recommande sur toutes choses de vous bien ménager.

Je ne vous parle point de guerre, parce qu’il n’y a pas ici la moindre nouvelle. On a commencé à plaider avant-hier le procès de d’Ussé.

Vous ai-je dit que la maréchale de Villars me demanda de vos nouvelles quand j’y allai souper ? Elle revient mercredi, pour ne plus retourner qu’à la fin d’août. La comtesse d’Estrées se meurt[2].

  1. Thérèse Colbert de Croissy, sœur du marquis de Torcy, mariée le 5 janvier 1704 au duc de Saint-Pierre, grand d’Espagne. Elle mourut en 1760. (L.)
  2. Elle ne tarda pas à mourir le 21 juillet 1742. Elle était sœur de madame de Choiseul ; elle est morte sans enfants de la poitrine. C’était une demoiselle Champagne. (Mémoires du duc de Luynes, t. IV, p. 194.) (L.)