Page:Du Deffand - Correspondance complète de Mme Du Deffand avec ses amis, tome 1.djvu/279

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morin, tout ce qui se passe à Fontevrault ; mais tout cela est bien près d’être épuisé.

Pour nos hommes, ils sont affreux, et surtout le président de Bancour, qui a à Paris je ne sais combien de comtesses et de marquises qui sont ses cousines ; qui connaît particulièrement M. de Rambures, sur le crédit duquel il fonde de grandes espérances. Il sait des particularités singulières sur toutes les choses dont on parle ; M. de Gaumont, le conseiller d’État, lui a confié des choses importantes ; il nous tire par la manche pour nous dire à demi-voix qu’il veut nous faire part d’une réponse fort plaisante que lui fit un jour un savetier ; il lui demandait quel était son métier : Je suis cordonnier mineur, lui dit-il ; il trouva cette réponse extrêmement comique, ainsi du reste ; mais il compte vivre beaucoup avec madame de Pecquigny et moi, quand il viendra à Paris. J’ai cependant beaucoup baissé de considération auprès de lui, parce que j’ai eu l’imprudence de lui apprendre que je n’avais point d’équipage ; mais comme il avait quelque disposition à faire cas de moi, il veut croire que c’est parce que je ne veux pas en avoir.


Ce lundi 9, à une heure après-midi.

Je reçois deux de vos lettres tout à la fois ; celle de vendredi et celle de samedi ; j’aurais dû recevoir hier celle de vendredi, mais je sais ce qui en a causé le retardement, et cela n’arrivera plus à l’égard des miennes, je n’y comprends rien ; on les porte tous les jours à Neufchâtel, d’où elles partent tous les jours pour Paris. Comme les premiers jours il n’y avait point de lettres qui vinssent ici de Neufchâtel, on pouvait bien n’y pas porter les nôtres ; mais ce qui me confond, c’est que cela n’aurait dû faire de retardement que pour les premières, et vous en auriez dû recevoir plusieurs à la fois. Quoi qu’il en soit, écrivez-moi tous les jours, je vous écrirai de même ; je recevrai les vôtres régulièrement, et comme vous ne devez pas être inquiet de ma santé, la date des miennes doit vous être assez indifférente. Je vous écrirai, tantôt, et je ne fermerai ma lettre que demain matin. Je finis celle-ci pour qu’elle puisse être portée tout à l’heure à Neufchâtel. J’ai été à la fontaine, je m’en porte bien, et j’espère que les eaux me feront de bons effets.

Je reçois un mot de Formont de vendredi, qui m’annonce son arrivée dans huit jours. Je l’attends un peu impatiemment.