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sucre, des drogues, et du vin ; et ils en rapportent du cuivre, de l’or, et de l’argent.

A dix-huit ou vingt lieues de Ning po dans la mer, est une île nommée Tcheou chan. Le port est très bon, mais peu commode pour le commerce. C’est où les Anglais abordèrent par hasard la première fois, n’ayant pu démêler ni trouver le chemin de Ning po parmi toutes les îles de cette côte.


CHAO HING FOU. Cinquième ville.


C’est dans une des plus belles plaines du monde que cette ville est située. Elle est toute percée de canaux, et il n’y a point de ville qui ressemble mieux à Venise, mais elle lui est préférable, en ce que l’eau qui remplit ses canaux est très claire et coulante.

De tous les environs on peut venir, entrer, et aller dans toute la ville en bateau. Il n’y a point de rue, où il n’y ait un canal, c’est pourquoi il y a quantité de ponts qui sont fort élevés, et presque tous d’une seule arche. Des deux côtés de chaque canal sont de grandes rues fort nettes, et pavées de grandes pierres de taille blanches, de la longueur pour la plupart de six à sept pieds. On y voit quantité d’arcs de triomphe assez propres. On lui donne au moins quatre lieues de circuit : c’est pour cela qu’elle est partagée en deux hien ou justices subalternes, qui ont leurs gouverneurs distingués, dont l’une s’appelle Chan in, et l’autre Quei ki.

Plusieurs maisons, ce qu’on ne voit guère dans les autres villes de la Chine, sont bâties de pierres de taille extrêmement blanches. Ces pierres se tirent d’une carrière presque inépuisable, qui est dans la montagne appelée Niao men chan, éloignée de deux heures de la ville. Les murs qui lui servent d’enceinte, sont entre deux fossés, l’un au dehors de la ville, et l’autre au dedans. Ces fossés sont remplis d’une eau aussi belle et aussi claire que celle des canaux.

Chao hing est en quelque sorte une ville de lettrés : ses habitants sont les plus redoutables de la Chine en fait de chicane. Comme il sont très versés dans la connaissance des lois, il n’y a point de viceroi, ni de grand mandarin, qui ne veuille avoir quelqu’un de cette ville pour lui servir de siang cong, ou de secrétaire. Elle compte dans son ressort huit villes du troisième ordre.

Le vin qu’on y fait en quantité, est très estimé, et se transporte dans tout l’empire. On voit à une demie lieue de la ville un tombeau, que les Chinois disent être du grand Yu, qui se fraya le chemin au trône, par le service qu’il rendit dès le commencement de la monarchie, en faisant couler dans la mer les eaux qui inondaient une partie de l’empire. A côté de ce tombeau, on a élevé un superbe édifice par les ordres du feu empereur Cang hi, qui la vingt-huitième année de son règne, alla marquer son respect à la mémoire de ce grand prince.

Il y a aussi près de là une montagne remarquable, qui s’appelle Heou chan, c’est-à-dire, Montagne du Singe, parce qu’elle en a un peu la figure ; c’est