Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/420

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qu’à le rendre plus furieux. Un de ces ministres, qui avait porté la parole, fut condamné à mort, et exécuté en sa présence.

La colère de l’empereur ne ralentit pas le zèle de ces sages ministres : ils adressèrent un mémorial à ce prince, où ils lui reprochèrent librement ses meurtres, sa cruauté, et les horreurs de sa vie. A peine en eut-il fait la lecture que transporté de rage, il prit la résolution d’en faire mourir les auteurs.

Tching tang, l’un des princes tributaires le plus respecté pour sa sagesse et sa vertu, et qui descendait de Hoang ti, ayant joint ses remontrances à celles des plus fidèles ministres, vit récompenser son zèle par la prison, où il fut enfermé l’année vingt-unième du cycle, et où néanmoins il ne demeura que peu de temps. Ces violences, qui ne faisaient que croître chaque jour, réunirent tous les ordres de l’État contre le tyran. D’un commun consentement ils choisirent Tching tang pour remplir sa place, et le forcèrent à lui déclarer la guerre.

Ce prince vertueux et désintéressé, déclara qu’il n’avait nul droit à la couronne, et que s’il prenait les armes, ce ne pouvait être que pour obliger l’empereur à se reconnaître, et à rentrer dans le devoir. Son armée fut bientôt prête, et chacun des princes lui fournit des troupes.

L’empereur en voulut lever de son côté mais il ne put rassembler qu’une poignée de ses sujets, tant la défection était générale. Il eut recours aux Tartares, et tâcha, par de belles promesses, de les engager à son service. Ce fut avec aussi peu de succès, il en était également détesté.

Dans un abandon si universel, il eut recours à la feinte et à la dissimulation ; il avoua ses crimes, et parut se repentir : la seule grâce qu’il demanda, c’est qu’on lui accordât la vie.

Tching tang se laissa fléchir, et persuadé que le changement de l’empereur était sincère, non seulement il le laissa vivre, mais il lui rendit aussi sa couronne. Il quitta aussitôt le commandement de l’armée, et retourna dans son petit État, donnant par là un exemple de modération et de désintéressement, qui fut admiré de tout l’empire.

A peine l’empereur se vit-il rétabli sur le trône, qu’il se replongea dans ses vices ordinaires ; il fit plus, car il leva à la hâte une armée contre Tching tang qu’il traitait de traître et de rebelle.

Tching tang se mit aussitôt à la tête de ses troupes pour se défendre. Mais lorsque les deux armées furent en présence, les soldats de l’empereur l’abandonnèrent, et passant dans l’armée de Tching tang, ils jetèrent leurs armes à ses pieds, et le reconnurent pour leur souverain.

Kié n’eut plus de ressource que dans la fuite : il se bannit lui-même en sortant de l’empire, et après trois années d’exil, il finit