Page:Du halde description de la chine volume 1.djvu/600

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quatre mille prisonniers, auxquels il fit couper le nez et les oreilles, et qu’il fit mettre ainsi défigurés sur le rivage.

Ce fut un spectacle, dont les soldats tartares ne purent soutenir la vue : et comme leurs visages hideux étaient un reproche continuel de leur défaite, on les fit tous mourir par ordre de l’empereur, comme étant coupables, soit pour n’avoir pas su vaincre, soit pour n’avoir pas su mourir glorieusement en défendant leur patrie.

Après cette victoire Tching tching cong pensa à se donner un lieu de retraite. Il jeta les yeux sur l’île de Formose qui était possédée par les Hollandais. Il l’assiégea par mer et par terre, et après quatre mois de résistance, le manque de vivres obligea enfin les assiégés à se rendre. C’est-là où il établit sa nouvelle domination : mais il n’en jouit pas longtemps. L’année suivante il mourut, et la laissa à son fils.

Il ne restait plus que Yong lié, qui, quoique chassé de toute la Chine, et réfugié dans le royaume de Pegou, lequel confine avec la province d’Yun nan, portait toujours le titre d’empereur, et pouvait donner lieu à quelques mouvements. La cour y envoya des troupes avec des lettres menaçantes au roi de Pegou, qui lui enjoignaient de remettre ce prince fugitif.

Il fut aussitôt livré avec toute sa famille entre les mains des Tartares qui le conduisirent dans la capitale, où il fut étranglé. À l’égard des deux reines, sa mère et son épouse, elles furent menées à Peking ; on leur donna à chacune un palais séparé, où elles furent traitées avec honneur, et où elles se sont toujours maintenues dans leur premier attachement à la foi.

Cette même année trente-huitième du cycle fut fatale à l’empereur, par la violente passion dont il se laissa transporter, pour la femme d’un jeune seigneur tartare qu’il avait vu chez l’impératrice. Cette dame fit part à son mari des empressements du prince, sur quoi le mari lui donna des instructions, dont par simplicité ou autrement, elle fit confidence à son amant.

Chun tchi, qui n’écoutait plus que sa passion fit venir ce seigneur, et sous prétexte de quelque négligence commise dans l’administration de sa charge, il lui donna un soufflet. Le Tartare ne put survivre à cet outrage, et il en mourut de chagrin le troisième jour.

L’empereur épousa aussitôt la veuve, et la fit reine. Il en eut un fils, dont la naissance fut célébrée avec pompe et magnificence. Mais ce fils si cher ne vécut que trois mois, et sa mère le suivit de près au tombeau. L’empereur fut inconsolable de cette perte : il voulut que trente hommes se donnassent la mort pour apaiser ses mânes ; cérémonie que les Chinois ont en horreur, et que son successeur a eu grand soin d’abolir.

Il ordonna aux Grands de sa cour et aux ministres de l’empire, de porter le deuil pendant un mois, au peuple pendant