Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/151

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une dame de distinction, qui dans cette sorte d’occasion, fait la fonction de présider aux cérémonies, et est à l’égard des femmes, ce que les présidents du tribunal des rits ont été à l’égard des hommes. Nul seigneur, nul mandarin n’oserait paraître.

Lorsque toutes ces dames furent arrivées près du palais de l’impératrice, son premier eunuque se présenta. Celle qui présidait à la cérémonie, s’adressant à lui : « Je prie, dit-elle, très humblement l’impératrice de la part de cette assemblée, de daigner sortir de son palais, et de venir se placer sur son trône. » Les femmes ne portent point leur compliment dans un petit livre, comme on avait fait pour l’empereur ; mais elles présentent une feuille d’un papier particulier, sur lequel le compliment est écrit avec différents ornements. L’impératrice sortit, et s’assit sur son trône, élevé dans une des salles de son palais.

Après que le papier eût été offert, les dames étant debout, firent d’abord deux révérences. Les femmes chinoises font la révérence comme les femmes la font en Europe. Cette révérence s’appelle Van fo : Van signifie dix mille : fo signifie bonheur ; Van fo, toute sorte de bonheur.

Au commencement de la monarchie que la simplicité régnait, on permettait aux femmes, même en faisant la révérence à un homme, de dire ces deux mots Van fo ; mais dans la suite l’innocence des mœurs s’étant un peu altérée, on a jugé qu’il n’était pas de la décence qu’une femme dit ces mots à un homme, et on n’a accordé aux femmes qu’une révérence muette ; et pour leur en ôter tout à fait l’habitude, on ne leur a plus permis de le dire même aux femmes.

Après ces deux révérences, les dames se mirent à genoux, et frappèrent seulement une fois du front contre terre ; c’est ainsi que le tribunal des rits l’avait prescrit. Alors elles se levèrent, et se tinrent debout avec respect, toujours avec le même ordre et dans un grand silence, pendant que l’impératrice descendait de son trône, et se retirait.

Il n’est pas étonnant qu’il y ait un cérémonial réglé pour la cour ; mais ce qui surprend, c’est qu’on ait établi dans le plus grand détail, des règles pour la manière dont les particuliers doivent en agir les uns avec les autres, quand ils ont à traiter, soit avec leurs égaux, soit avec ceux qui sont d’un rang supérieur. Nul état ne se dispense de ces règles et depuis les mandarins, jusqu’aux plus vils artisans, chacun garde admirablement la subordination que le rang, le mérite, ou l’âge exigent.

Le salut ordinaire consiste à joindre les mains fermées devant la poitrine, en les remuant d’une manière affectueuse, et à courber tant soit peu la tête, se disant réciproquement tsin tsin : c’est un mot de compliment qui signifie tout ce qu’on veut ; quand ils rencontrent une personne, pour qui l’on doit avoir plus de déférence, ils joignent les mains, les élèvent et les abaissent jusqu’à terre, en inclinant profondément tout le corps.

Lorsqu’après une longue absence deux personnes de connaissance se rencontrent, ils se mettent l’un et l’autre à genoux, et se baissent jusqu’à terre ; ils se relèvent et recommencent la même cérémonie jusqu’à deux et