Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/17

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fidélité de son fils, et avec une fermeté héroïque, se livra à la rage et à la cruauté du tyran.

Un sang si cher que le général vit couler, ne servit qu’à allumer dans son cœur un plus grand désir de vengeance. Mais comme il était difficile qu’il pût résister longtemps aux efforts de l’usurpateur, il crut qu’en piquant la générosité du roi tartare, il pourrait non seulement faire la paix avec lui, mais encore l’engager à le secourir de toutes ses forces : Tsong te (c’est le nom de ce roi) moins flatté des richesses qui lui étaient offertes par le général chinois, que piqué d’une ambition secrète, goûta si fort cette proposition, que dès le jour même il parut à la tête de quatre-vingt mille hommes. L’usurpateur informé de la réunion des armées chinoises et tartares, n’osa en venir aux mains avec deux si grands capitaines ; il se retira en hâte à Peking, et après avoir fait charger plusieurs chariots de ce qu’il y avait de plus précieux dans le palais, il y mit le feu, et s’enfuit dans la province de Chen si, où il eut tant de soin de se cacher, qu’on ne pût jamais découvrir le lieu de sa retraite. Quelque diligence qu’il fît, une partie du butin tomba entre les mains de la cavalerie tartare qui le poursuivait.

Cependant Tsong te qui pouvait aisément dissiper son armée, aima mieux se rendre à Peking, où il fut reçu aux acclamations des Grands et du peuple, et regardé comme leur libérateur. Il sut si bien tourner les esprits, qu’on le pria de gouverner l’empire : les vœux des Chinois s’accordèrent avec ses vues : mais une mort précipitée l’empêcha de jouir du fruit de sa conquête. Il eut le temps de déclarer pour successeur son fils Chun tchi, qui n’avait que six ans, et il confia son éducation et le gouvernement de l’État, à un de ses frères nomme A ma van.


Chun tchi monte sur le trône

Ce prince eut le courage et l’adresse de soumettre la plupart des provinces qui avaient de la peine à subir le joug tartare, et pouvant retenir l’empire pour lui-même, il fut assez désintéressé pour le remettre entre les mains de son neveu, aussitôt qu’il eut atteint l’âge de gouverner.

Le jeune empereur parut tout à coup habile en l’art de régner, qu’il gagna en peu de temps le cœur de ses sujets. Rien n’échappait à la vigilance et à ses lumières, et il trouva le moyen d’unir tellement les Chinois et les Tartares, qu’ils semblaient ne plus faire qu’une même nation. Il soutint pendant son règne la majesté de l’empire, avec une supériorité de génie qui lui attira pendant sa vie l’admiration, et à sa mort les regrets de tout le peuple. Lorsqu’il fut prêt de mourir, n’ayant encore que 24 ans, il appela les quatre premiers ministres. Après leur avoir témoigné le déplaisir qu’il avait de n’avoir pu récompenser le mérite de tant de fidèles sujets qui avaient servi son père, il leur déclara que parmi ses enfants, celui qui lui paraissait le plus propre à lui succéder, était Cang hi, qui n’avait alors que huit ans ; qu’il le recommandait à leurs soins ; et qu’il attendait de leur probité et de leur fidèle attachement, qu’ils le rendraient digne de l’empire, qu’il lui laissait sous leur tutelle.


Est déclaré empereur.

Dès le lendemain de la mort de l’empereur Chun tchi, son corps ayant été mis dans le cercueil, on proclama Cang hi empereur. Il monta sur le trône,