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croient que c’est une affectation de sa part, pour ne pas écouter des raisons qui pourraient lui faire changer des résolutions déjà prises.


Son caractère.

Du reste il est appliqué aux affaires de son État, ferme et décisif, infatigable dans le travail, toujours prêt à recevoir des mémoriaux et à y répondre, ne songeant qu’à ce qui peut procurer le bonheur des peuples. C’est même lui faire sa cour que de lui proposer quelque dessein qui tende à l’utilité publique et au soulagement des peuples ; il y entre avec plaisir et l’exécute sans nul égard à la dépense. Enfin il est aussi absolu, et aussi redouté que l’empereur son père ; mais par la conduite qu’il a tenu à l’égard des ouvriers évangéliques, il est bien différent de ce grand prince qui les a constamment favorisés, et qui s’est toujours déclaré le protecteur de notre sainte religion.


Royaumes tributaires de la Chine.

Outre l’étendue prodigieuse de cet empire, qui tout grand qu’il était déjà, s’est si fort accru par l’union des Tartares avec les Chinois, il y a encore d’autres royaumes qui sont tributaires de l’empereur : la Corée, le Tong king, la Cochinchine, Siam, etc. lui doivent un tribut réglé ; c’est lui qui en quelques occasions nomme les rois, du moins il faut toujours qu’il les confirme. Néanmoins ces États ont leur gouvernement particulier et n’ont guère de ressemblance avec la Chine, soit qu’on fasse attention à la fertilité des terres, au nombre, à la beauté, et à la grandeur des villes ; soit qu’on ait égard à la religion, à l’esprit, aux mœurs, et à la politesse des habitants. Aussi les Chinois en font-ils très peu de cas ; ils les regardent comme des barbares, et évitent avec soin leur alliance.


Division de la Chine

On a déjà dit que la Chine est divisée en 15 provinces, mais ces provinces ne sont pas toutes également peuplées. Depuis Peking jusqu’à Nan tchang qui est la capitale de la province de Kiang si, il s’en faut bien que le peuple y fourmille comme dans les provinces de Tche kiang, de Kiang nan, de Quang tong, de Fo kien, et quelques autres : c’est ce qui fait que les missionnaires qui n’ont parcouru que ces belles et nombreuses provinces où les villes et les grands chemins sont remplis de peuples jusqu’à embarrasser le passage, ont pu augmenter le nombre des habitants de cet empire. A tout prendre il paraît cependant qu’il y a à la Chine beaucoup plus de monde que dans toute l’Europe.


Étendue de Peking.

Quoique Peking soit plus grand que Paris pour l’étendue du terrain, je ne crois pas que le nombre des habitants puisse monter à plus de trois millions. La supputation en est d’autant plus sûre, que tous les chefs de famille sont obligés de rendre compte aux magistrats du nombre de personnes qui les composent, de leur âge et de leur sexe.

Plusieurs choses contribuent à cette multitude prodigieuse d’habitants : la multiplicité des femmes qui est permise aux Chinois, la bonté du climat qu’on a vu jusqu’à présent exempt de peste, leur sobriété, et la force de leur tempérament, le mépris qu’ils font des autres nations, qui les empêche de s’aller établir ailleurs, et même de voyager ; mais ce qui y contribue plus que toute autre chose, c’est la paix presque perpétuelle dont ils jouissent.

Il y a dans chaque province un grand nombre de villes du premier, du second et du troisième ordre ; la plupart sont bâties sur des rivières navigables,