Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/208

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en prend quelquefois qui pèsent plus de huit cents livres : on ne voit guère de poissons qui ait la chair plus ferme. On ne le pêche qu’en certain temps, savoir lorsqu’il passe du lac Tong ting hou dans cette rivière.

Ce lac est le plus grand qui soit à la Chine, et c’est beaucoup dire ; car il n’y a guère de provinces, où il ne se trouve des lacs d’une étendue prodigieuse, tels que sont le lac Hong se hou, le lac Ta hou, le lac Po yang hou, etc. Celui-ci, par exemple, qu’on appelle encore le lac de Iao tcheou, est formé par le confluent de quatre rivières aussi grandes que la Loire, qui sortent de la province de Kiang si ; il a trente lieues de circuit, et on y essuie des typhons, comme sur les mers de la Chine.


Du poisson d’or.

Nous avons déjà parlé dans l’idée générale que nous avons donné de cet empire, d’un certain poisson extraordinaire, appelé poisson d’or, ou poisson d’argent, que les grands seigneurs conservent ou dans leurs cours, ou dans leurs jardins, comme un ornement particulier de leurs palais. Le père le Comte qui en a fait la description, ajoute à ce que nous en avons dit, des particularités que je ne dois pas omettre. « Ces poissons, dit ce Père, sont d’ordinaire de la longueur du doigt et gros à proportion. Le mâle est d’un beau rouge depuis la tête jusqu’à la moitié du corps, et même davantage, le reste avec toute la queue en est doré, mais d’un or si lustré et si éclatant, que nos véritables dorures n’en approchent pas. La femelle est blanche ; elle a la queue, et même une partie du corps parfaitement argentée. La queue de l’un et de l’autre n’est pas unie et plate comme celle des autres poissons, mais formée en bouquet, grosse, longue, et qui donne un agrément particulier à ce petit animal, dont le corps est d’ailleurs parfaitement bien proportionné.

« Ceux qui les veulent nourrir, doivent en prendre un grand soin, parce qu’ils sont extraordinairement délicats et sensibles aux moindres injures de l’air. On les met dans un bassin fort profond et fort large, au fond duquel on a accoutumé de renverser un pot de terre troué par les côtés, afin qu’ils puissent durant les grandes chaleurs s’y retirer, et se mettre ainsi à couvert du soleil. On jette aussi sur la surface de l’eau certaines herbes particulières, qui s’y conservent toujours vertes, et qui y entretiennent la fraîcheur. Cette eau se change deux ou trois fois la semaine ; de manière néanmoins qu’on en met de nouvelle, à mesure qu’on vide le bassin, qu’il ne faut jamais laisser à sec. Si l’on est obligé de transporter le poisson d’un vase à un autre, il se faut bien donner de garde de le prendre avec la main ; tous ceux qu’on touche, meurent bientôt après, ou se flétrissent ; il faut pour cela se servir d’une petite cuillère de fil attachée par le haut à un cercle de bois, dans laquelle on les engage insensiblement. Quand ils y sont entrés d’eux-mêmes, on a soin de ne les pas heurter, mais de les tenir toujours dans la première eau, qui ne se vide que lentement, et qui donne le temps de les transporter dans l’eau nouvelle. Le grand bruit, comme celui de l’artillerie, ou du tonnerre, une odeur trop forte, un mouvement violent, tout cela