Page:Du halde description de la chine volume 2.djvu/240

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les eaux en certains endroits, par de longues et de fortes digues. Comme les terres de la province de Ho nan sont basses, et que les digues peuvent se rompre, ainsi qu’il arriva autrefois, comme je l’ai expliqué ailleurs, on y use de la précaution suivante ; on fait à la plupart des villes, à la distance d’un demi quart de lieue des murs, une forte enceinte, et comme une levée de terre revêtue de gazon.


Des barques.

Les canaux, de même que les rivières, sont tout couverts de barques grandes, moyennes, ou plus petites : on en voit quelquefois plus d’un quart de lieue de suite : elles sont si serrées, qu’il n’est pas possible d’y en insérer aucune. On en compte environ dix mille qui sont entretenues par l’empereur, et uniquement destinées à porter des provinces à la cour, le tribut de toutes sortes de provisions : ces barques impériales se nomment leang tchouen, barques des vivres. Elles sont toutes à varangue plate, et le corps du bâtiment est également large de la poupe à la proue.

Il y en a d’autres qui sont destinées à porter les étoffes, les brocards, les pièces de soie, etc, qu’on nomme long y tchouen, c’est-à-dire, barques des habits à dragon, parce que la devise et les armoiries de l’empereur sont des dragons à cinq ongles, et que ses habits et ses meubles sont toujours ornés de figures de dragons en broderie ou en peinture.

Chaque barque ne fait qu’un voyage par an, et ne porte que le quart de sa charge. On tire du trésor royal une certaine somme qu’on donne au patron de la barque, à proportion de la distance qu’il y a jusqu’à la cour. Par exemple de la province de Kiang si, qui est à plus de trois cents lieues de Peking, on donne cent taels. Cette somme paraît n’être pas suffisante pour les dépenses qu’il doit faire : mais il s’en dédommage et de reste, par les places qu’il donne aux passagers, et par les marchandises qu’il transporte, et qui passent les douanes sans rien payer.

On voit une troisième sorte de barques appelées tso tchouen, qui sont destinées à transporter les mandarins dans les provinces où ils vont exercer leurs charges, et les personnes considérables qui sont envoyées de la cour, ou qui y sont appelées : elles sont plus légères et plus petites que les autres ; elles ont deux ponts : sur le premier ou sur le tillac, il y a d’un bout à l’autre un appartement complet, et qui s’élève au-dessus des bords d’environ sept à huit pieds ; les chambres en sont peintes en dedans et en dehors, vernissées, dorées, et d’une grande propreté. J’en ai fait ailleurs une description fort détaillée. On y peut prendre son sommeil et ses repas, y étudier, y écrire, y recevoir des visites, etc. enfin un mandarin s’y trouve aussi commodément et aussi proprement que dans son propre palais. Il est impossible de voyager plus agréablement que dans ces barques.

Il y a encore une infinité de barques qui appartiennent à des particuliers, les unes très propres, qui se louent à bon compte aux lettrés et aux personnes riches qui voyagent ; les autres bien plus grandes, et dont